À la veille des Européens de Blenheim, où en sont les couples français côté dressage ?
Durant les dix jours de préparation saumuroise des Français pour les championnats d’Europe de concours complet, les sélectionnés tricolores se sont entraînés pour les trois tests au programme de l’échéance continentale. Une importance particulière a été accordée au dressage, qui n’est d’ordinaire pas le point fort des Bleus. Ils ont bénéficié des conseils des entraîneurs nationaux adjoints en charge du dressage, Amélie Billard et Philippe Limousin, mais aussi du regard de Christoph Hess, intervenant technique allemand régulièrement sollicité en renfort par la Fédération française d’équitation.
Depuis cette année, un duo d’entraîneurs nationaux adjoints est en charge de la préparation des complétistes français pour le test de dressage : Philippe Limousin, retraité du Cadre noir et ancien cavalier de haut niveau de dressage, ainsi qu’Amélie Billard, elle aussi ex-cavalière de haut niveau, mais en concours complet, et évoluant jusqu’en Pro 1 en dressage. “Pour l’instant, le duo formé par Philippe Limousin et Amélie Billard réalise un bon travail avec les Français sur le plat: Philippe apporte son expérience et Amélie représente la nouvelle génération, le futur”, salue Christoph Hess, expert germanique internationalement reconnu auquel la Fédération française d’équitation (FFE) fait régulièrement appel depuis plusieurs années.
L’encadrement a constaté une bonne évolution technique durant le stage de préparation. “J’ai vu des cavaliers réaliser des progrès significatifs”, observe Amélie Billard. “Ils maîtrisent mieux la technicité des reprises et du travail de dressage, alors qu’auparavant, certains avaient une pratique un peu intuitive, essentiellement basée sur leur feeling. La locomotion de leurs chevaux paraît également plus juste.” “Je suis content des reprises présentées en fin de stage, par les chevaux qui vont concourir à Blenheim comme par les autres qui étaient présents à Saumur”, abonde Philippe Limousin. “Nous avons travaillé sur la position des cavaliers, le contact, le rythme et l’équilibre. Il est important qu’ils aient la sensation de monter, et non pas de subir leurs reprises. Nous cherchons aussi à créer de la fluidité, qui permet aux chevaux ne disposant pas d’une très bonne locomotion de bien se présenter. Il faut comprendre que tout le monde peut danser, mais tout le monde ne peut pas être danseur étoile. Bien sûr, il y a toujours des points de détail à améliorer, mais il n’est pas l’heure de se mettre martel en tête. L’important est d’avoir conscience des possibles petites fautes pour pouvoir les éviter. Maintenant, nous espérons tous que les progrès de nos couples soient visibles sur le terrain.” Moins présent auprès des Français que les saisons précédentes, Christoph Hess, qui n’avait vu les chevaux que deux fois avant le rassemblement saumurois, considère que beaucoup de couples “ont vraiment évolué positivement, et tous sont sur le bon chemin. Les cavaliers montent proprement et je suis ravi de voir qu’ils ont adopté un vrai système d’entraînement au dressage pour préparer ce championnat. Ils ont compris que les trois tests sont très connectés dans leur approche. De fait, mieux ils s’entraînent sur le plat, et plus le cross et l’hippique leur paraissent aisés. Ils respectent bien l’échelle de progression, qui est le fil conducteur d’une évolution sûre. En outre, cette année, aucun couple olympique français ne prendra part aux Européens, ce qui va les rendre d’autant plus intéressants à suivre!”
De nouvelles méthodes à expérimenter
Si les progrès sont notables, beaucoup de travail doit encore être fourni dans l’optique des Mondiaux d’Aix-la-Chapelle 2026 et, de manière plus lointaine encore, des JO de Los Angeles 2028. “Nos cavaliers doivent former un vrai couple avec leur cheval sélectionnable, mais nous avons aussi à cœur de développer une base, comme le font les Anglais, car les Français montent tout aussi bien à cheval qu’eux”, expose Philippe Limousin. “Nous devons poursuivre sur cette trajectoire, si possible en avançant plus vite que les nations dominantes sur le test de dressage”, considère quant à elle Amélie Billard. Également coach mental, elle a proposé un tout nouvel exercice aux cavaliers en partance pour Blenheim lors du stage de Saumur : reconnaître leur reprise à pied, comme ils le font pour les parcours de cross ou d’obstacles, tout en énonçant les actions qu’ils envisagent de réaliser à cheval au fur et à mesure. “Nous nous sommes ainsi rendu compte qu’ils n’étaient pas toujours dans le juste” raconte Amélie Billard. Les cavaliers ont aussi regardé en vidéo des reprises réalisées par les meilleurs couples du moment, et même quelques-unes de dressage pur – même si les “attentes” diffèrent légèrement, “il est bon de savoir ce qui y est attendu”, développe la coach, dont la prise de poste n’a pas été particulièrement aisée: “Même si cela peut surprendre en 2025, intégrer une équipe traditionnellement essentiellement masculine en étant la première femme à occuper mon poste n’a pas été si simple.”
Pour continuer d’avancer et de se rapprocher des meilleures nations sur le dressage, la quadragénaire cherche de nouvelles tactiques. “Nous avons la chance de nous entraîner sur le site de l’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE) de Saumur, ce qui est d’abord très positif au vu des capacités vétérinaires et infrastructures dont nous disposons…mais il y a aussi ici des chevaux dressés finement”, expose-t-elle. “Durant l’hiver, j’aimerais que les cavaliers puissent s’essayer un peu au piaffer, au passage, mais aussi à rapprocher les changements de pied pour désacraliser un peu ce mouvement, et afin qu’ils ressentent les bonnes sensations pour pouvoir les rechercher après. Aujourd’hui, les cavaliers ont une zone de confort réduite, donc j’aimerais qu’ils aient touché à des mouvements plus difficiles, afin que les attendus de leur catégorie leur paraissent plus facilement atteignables.”
Blenheim… et après?
Alors que le test de dressage débutera demain aux Européens de Blenheim, Amélie Billard observe un bon esprit d’équipe entre les Tricolores. “Tout le monde s’entend plutôt bien”, décrit-elle. “On ressent un esprit de cohésion, même si le forfait de Nicolas Touzaint a mis un coup au moral des troupes. On a perdu l’un des piliers et cela n’a pas été facile.” “L’Angleterre sera de nouveau favorite, mais concernant les autres équipes, il faudra voir comment se passe la compétition”, observe quant à lui Christoph Hess par rapport aux forces en présence en Grande-Bretagne. “Même pour l’Allemagne, rien n’est joué. Il faudra donc être en bonne forme et très concentrés.”
Ces championnats continentaux ne sont qu’une étape, après lequel l’encadrement dressera un premier bilan. “Les effectifs vont devoir continuer à s’étoffer, et si nous avons travaillé lors de ce stage dans l’optique de préparer les championnats d’Europe, nous ne devons pas oublier l’importance de constituer une base solide de cavaliers sur laquelle s’appuyer”, conclut Philippe Limousin. Il n’est encore pas certain que Christoph Hess continue à collaborer avec la FFE, mais l’Allemand “reste ouvert à toutes sortes de propositions de la part de l’instance.”