“Organiser un CCI 4*-L à Bertichères était un pari audacieux, et le travail accompli est remarquable”, Jean-Luc Force

Dimanche, la septième édition du Royal Jump s’est achevée en beauté au château de Bertichères, à Chaumont-en-Vexin de l’Oise. Une fois encore, le cocktail mêlant différentes disciplines équestres, avec le concours complet en proue, animations culturelles et plaisir de profiter de la nature a fait recette. La réussite de cet événement, qui pourrait en inspirer d’autres en France, tout en respectant les spécificités de chaque site et de chaque organisateur, ne laisse pas indifférent Jean-Luc Force. L’homme de cheval, nommé sélectionneur de l’équipe de France en début d’année, salue aussi la réussite sportives des tous premiers CCI 4*-L et S proposés par l’équipe d’Hervé Taieb. 



Comment percevez-vous le déroulement de cette première édition du Royal Jump de Bertichères avec des CCI de niveau 4*?
Tout se passe vraiment très bien. Je dirais même que c’est un événement exceptionnel, qui se tient dans un cadre magnifique. Ce qui le rend vraiment unique, c’est la particularité de son organisation et la diversité des activités proposées. C’est un format qui nous interpelle, alors que la Fédération française d’équitation réfléchit actuellement au soutien à apporter aux organisateurs afin qu’ils puissent atteindre un équilibre financier durable. 

Selon vous, qu’apporte justement cette diversité d’activités?
Hervé Taieb (président du comité d’organisation, ndlr) nous montre ici qu’il est possible de croiser plusieurs types d’épreuves, de disciplines, voire de sports. C’est un modèle intéressant et inspirant. La dimension internationale de l’événement permet aussi de brasser différentes nations et profils de compétiteurs, ce qui est enrichissant pour tous. 

Dans quelle mesure organiser un CCI 4*-L, avec un cross de format long, était-il un défi?
C’était un pari audacieux et même un peu inquiétant au départ, notamment parce qu’il fallait trouver la bonne distance. Nous sommes venus sur place il y a deux mois pour observer l’avancement du projet, et le travail accompli est remarquable. La construction du parcours de cross a requis un vrai chantier, mais les organisateurs ont fait ce qu’il fallait. Le terrain a été beaucoup arrosé pour rendre le sol le plus acceptable possible. Il y a eu un vrai effort, et le résultat est là. La construction du cross était superbe: un travail propre, soigné, très esthétique – je dirais même léché. C’est une vraie plus-value. Ensuite, il faut du temps pour que la nature fasse son œuvre et que les sols s’enracinent. D’ici deux ans, ce sera parfait. 

Malgré tout, y a-t-il des points à améliorer ?
Bien sûr. Quand on propose autant d’activités en parallèle, il est difficile d’être parfait partout. Pour autant, ce qui fait la force de cet événement, c’est l’énergie et la volonté de bien faire pour servir la filière.  

Certains cavaliers ont dit qu’il ne se croyaient pas en France, tant l’ambiance est différente de celle qu’ils connaissent ailleurs… 

Oui, on retrouve ici une ambiance très anglo-saxonne, comme à Badminton ou Burghley. C’est une immersion complète dans l’univers du cheval, avec une vraie pluralité de disciplines et une volonté de proposer d’autres animations pour attirer le public. L’esthétique du site y contribue également. De plus, le chef de piste anglais Eric Winter apporte une touche très décorative, très picturale, qui se ressent. Cela étant, je dirais que cela reste un événement bien français, qui peut continuer à avancer progressivement dans cet esprit-là. 



“Saisir ces opportunités pour reconnecter les humains aux chevaux”

Ce modèle vous semble-t-il duplicable ailleurs en France?

Il y a pas mal de terrains qui s’y prêtent. D’ailleurs, nous serons à Vittel dans quinze jours, un site comprenant lui aussi un golf. L’organisation n’y est pas encore aussi puissante, mais peut-être devons-nous laider à franchir un cap. L’idée serait d’accompagner les organisateurs afin qu’ils puissent imaginer d’autres modèles et solutions pour parvenir à un équilibre financier. Il s’agit surtout d’attirer davantage de public et d’amener plus de personnes à découvrir notre discipline. En revanche, il ne faut pas chercher à copier Bertichèresparce que sa spécificité vient justement de cette alchimie unique et de sa capacité à faire venir des artistes ou à organiser des animations comme des défilés de mode, etc. 

À plus long terme, quel rôle peut jouer ce type d’événement dans le lien entre le public et le monde du cheval?
Il faut saisir ces opportunités pour reconnecter les humains aux chevaux. Dans notre société actuelle, le cheval a presque disparu du quotidien, alors qu’il était autrefois omniprésent. Aujourd’hui, beaucoup de gens se demandent ce qu’il fait encore auprès des humains. C’est pourquoi il faut leur permettre de venir à la rencontre des chevaux et de vivre des événements où ils peuvent les observer, les comprendre et les apprécier. C’est une ouverture essentielle. 

Un mot sur la soirée d’hommage aux cavaliers olympiques?
Ce fut un beau moment, l’occasion pour le public de rencontrer les médaillés olympiques, mais aussi de rendre hommage à Thierry (Touzaint, sélectionneur national auquel Jean-Luc Force a succédé en début d’année, ndlr) pour tout le travail accompli au fil des années. C’était une très belle opportunité de mettre en valeur nos athlètes : ceux qui ont brillé à Paris, mais aussi ceux qui performent depuis longtemps, comme Karim (Laghouag, ndlr) ou Nicolas (Touzaint, ndlr). Il s’agissait d’un bel instant de transmission intergénérationnelle — entre cavaliers, mais aussi, à un autre niveau, entre Thierry et moi. Hervé (Taieb, ndlr) a su marquer le coup avec justesse et émotion. Thierry ne part pas par la petite porte, mais bien par la grande.